Transformation digitale et environnementale
- MON
- Alix Duréault
Comment conjuguer IT et écologie ?
Ce MON tournera autour de deux problématiques, est il possible de conjuguer les enjeux climatiques et les enjeux de digitalisation ? et Comment les méthodes d'analyse environnementales (analyse cycle de vie, bilan carbone, analyse coût bénéfice, ...) peuvent elles s'appliquer à des produits immatérielles comme les applications webs ?
Empreinte environnemental du numérique
Sources :
Faits, Statistiques et Chiffres clés : Evolution du web de 1990 à 2024 - Stephen MESNILDREY
Modélisation, simulation et optimisation pour l’éco-fabrication - Thèse de Hichem Hassine
Sopra Steria - La frugalité numérique : une stratégie viable ?
Le but de ce MON n’est pas de s’attarder sur les enjeux environnementaux autour du numérique. Cependant, il peut quand même être intéressant de parler rapidement de celle-ci pour comprendre l’enjeu autour de la transformation digitale.
- Le numérique représente presque 5% des émissions de Gaz à effet de serre dans le monde : 79% vient des terminaux utilisateurs, 16% des data centers et 5% des réseaux et services.
- D’ici 2040, le numérique devrait représenter 7% des émissions de Gaz à effet de serre dans le monde.
- L’impact environnemental et social des outils provient en grande majorité des matériaux et de leur fin de vie.
- L’impact environnemental et social des data centers provient principalement de la consommation en électricité et en eau.
- Plus de 1,93 milliard de sites web en ligne en 2022 contre 800 millions en 2015. Les sites les plus visités ont plus d’un milliards de visites mensuelles, allant jusqu’à 100 milliards pour Google.
- La consommation quotidienne d’un datacentre peut atteindre celle d’une ville européenne de 30 000 habitants.
- La simplicité du numérique provoque un effet rebond.
- Certaines technologies en vogue comme l'IA sont très gourmandes en énergie.
- Le numérique c’est 10 % de l’électricité consommée en France.
- 3 trillions d’octets de données sont générées chaque jour.
- Le taux de croissance des émissions de GES dues au numérique est d’environ 6 % chaque année entre 2019 et 2021.
- Le numérique mondial représente un 7ème continent de la taille de 2 à 3 fois celle de la France.
- 4,2 % de consommation d’énergie primaire ; 3,2 % des émission de gaz à effet de serre ; 0,2 % de la consommation d’eau ; 5,6 % de la consommation d’électricité et 40 % de votre forfait GES soutenable (ce que vous avez le droit d’émettre pendant 1 an pour rester à 1,5 °C de réchauffement global)
- Le poids d’une page web a été multiplié par 155 entre 1995 et 2022
Pour en aller plus loin sur le sujet, il peut être intéressant de consulter le cours de Sobriété numérique du Temps 1 ou les MONs de Louise Gacoin et Nicolas Ouzoulias.
Solutions individuelles
Ce n’est pas le but de ce MON de s’attarder sur ce sujet mais un travail à déjà été réalisé dans les MONs de Louise Gacoin et Nicolas Ouzoulias. La vidéo Thibault Menz - C'est quoi la sobriété numérique est aussi intéressante sur le sujet.
Sobriété numérique
Sources :
- MON 3.2 de Louise Gacoin
- Thibault Menz - C'est quoi la sobriété numérique
- Sopra Steria - La frugalité numérique : une stratégie viable ?
La sobriété numérique est « la démarche qui consiste à concevoir des services numériques plus sobres et à modérer ses usages numériques quotidiens ». - Définition de l'association GreenIT.fr, 2008
Le sujet de la sobriété numérique pour les consommateurs et les constructeurs est assez encadré par la loi. En France notamment par la loi REEN qui couvre différents sujets dont la sensibilisation à l’impact environnemental du numérique, la promotion d’une stratégie numérique responsable dans les territoires et la promotion des datacentres et réseaux moins énergivores.
La sobriété numérique pour les entreprises peut avoir quelques avantages autres qu’environnementales comme une réduction des dépenses et la préservation de la réputation de l’entreprise auprès de ses collaborateurs.
Cependant, cette notion reste incomplète, elle permet de repenser le numérique que l'on produit mais reste très vague, elle n'offre aucune réelle piste concrète, aucun moyen de mesure.
Pour en aller plus loin sur le sujet, il peut être intéressant de consulter le MON de Louise Gacoin sur le sujet.
Bilan carbone des algorithmes
Sources :
- Green Algorithms: Quantifying the carbon footprint of computation - Loïc Lannelongue, Jason Grealey, Michael Inouye
- Outil Green Algrithms
L’étude que j’ai lu vise à proposer une méthodologie pour mesurer l’impact carbone de n’importe quelle opération numérique. Cette étude a aussi produit un outil en ligne nommé Green Algorithms qui permet l’estimation de l’empreinte carbone d’un calcul. Même si l’étude et l’outil sont très concentrés sur le côté calcul numérique, il est intéressant de s’y plonger afin de comprendre comment le numérique et notamment les calculs des serveurs et ordinateurs impactent l’environnement.
La méthode proposée dans cet article prend en compte toutes les sources d’énergies de l’informatique : processeurs, mémoire, frais généraux des installations informatiques, localisation géographique, … Pour tout prendre en compte, la méthode considère la quantité d’énergie nécessaire (dépend des ressources de calcul utilisés) ainsi que les polluants émis à la production de cette énergie (dépend de la localisation et des méthodes de production).
Pour la consommation d’énergie, ce qui est pris en compte est le temps d’exécution, le nombre, le type et le temps de traitement des coeurs de calcul, la quantité de mémoire mobilisée et la consommation d’énergie. Dans le document, on peut retrouver l’impact de chacun de ces composants détaillée.
Outre la présentation de la méthode et de l’outil, l’article prend le temps de discuter les mesures qui peuvent être prise pour améliorer le bilan carbone des calculs informatiques.
- Choix du centre de données (consommation de 20 gCO2e/kWh en Norvège comparé à plus de 800 gCO2e/kWh en Afrique du Sud). Cependant déménager les centres de données n’est pas forcément intéressant car en se déplaçant on utilise les ressources non utilisés qui sont souvent fossiles.
- Optimisation des algorithmes
- Limiter le nombre d’exécution
- Compensation des émissions de gaz à effets de serre
Evaluer l’empreinte environnementale d’un site internet - analyse du cycle de vie
Les questions que je me pose sur le sujet sont :
- De quoi est constituer l’empreinte environnementale d’un site web ?
- Comment évaluer l’impact environnementale d’un site web ?
- Comment diminuer l’impact environnemental d’un site web ?
Empreinte environnementale d’un site web
Sources :
- Ecoindex - Comment ça marche
- Comment mesurer l'empreinte carbone de son site internet ? - lemon-interactive
“L’empreinte physique du site se caractérise, notamment, par la quantité de mémoire vive (RAM) et le nombre de cycles processeur (CPU) consommés par le processus navigateur affichant l’URL analysée. " - Définition de GreenIT
“L’empreinte environnementale d’une page est représentée par son équivalence en matière d’émissions de gaz à effet de serre et de consommation d’eau pour un nombre donné de visiteurs.” - Définition de GreenIT
L’analyse de l’empreinte physique dans le temps (évolution de la consommation mémoire et charge CPU) permet d’identifier des corrélations et effets de seuil : blocage CPU, surconsommation mémoire, etc. L’empreinte environnementale est quand à elle calculée en fonction du niveau d’écoconception du site.
Un site moyen aura un impact de 2 g.eq.CO2 et 3 cl. d’eau bleue par page web. Cette valeur provient d’une analyse cycle de vie effectué sur l’ensemble du cycle de vie du calcul, transport et affichage d’une page web.
Quelques uns des éléments qui contribuent à l’empreinte environnementale d’un site web sont :
- Transfert de données (chargement site web)
- Intensité énergétique des données web
Evaluer cette empreinte
Sources :
- Evaluer l'empreinte environnemantale de votre site Internet - France Num
- Ecoindex
- Ecoindex - Comment ça marche ?
- Comment mesurer l'empreinte carbone de son site internet ? - lemon-interactive
- Modélisation, simulation et optimisation pour l’éco-fabrication - Thèse de Hichem Hassine
La fiche gouvernementale écrite par Green IT présente l’outil EcoIndex. C’est un outil gratuit qui permet d’évaluer à partir de l’URL d’un site :
- son efficacité environnementale absolue
- sa performance environnementale relative
- l’empreinte dite technique de la page (poids, complexité,…)
- l’empreinte environnementale associée (gaz à effet de serre et eau)
Pour effectuer le calcul, l’outil prend en compte :
- la complexité de la page (DOM) : un effort plus important à fournir de la part du processeur de votre ordinateur pour afficher la page quand la page est plus complexe
- le poids des données transférées : le transport de ces données, plus ou moins lourdes, du serveur au navigateur nécessite de l’énergie
- le nombre de requêtes HTTP : prendre en compte l’effort fait par les serveurs pour afficher la page testée
Si cela vous intéresse, le site de l’outil EcoIndex détaille la méthode de calcul et notamment la pondération des différents critères. Il détaille aussi l’api utilisée pour analyser une page web.
D’autres outils sont disponibles comme :
- Website carbon calculator : estime les émissions de CO2 à partir du transfert de données, de l'intensité énergétique des données web, de la source d’énergie du datacenter et du trafic du site web.
- Cimetrix : évalue les performances web et notamment la vitesse de chargement d’une page web.
Exemple d’évaluation
Pour cela, j’ai utilisé l’outil EcoIndex disponible ici : Ecoindex.
J’ai décidé de regarder l’impact du site de Do It.
En faisant tourner l’algorithme, on obtient comme prévu les notes du site :
- Efficacité environnementale absolue : 87/100
- Performance environnementale relative : A
- Classement de la page : 23958 / 442404
- Poids du site : léger (0.751 Mo)
- Complexité : simple (108 éléments)
- Requêtes : Peu (7 requêtes)
- Détail de l’empreinte environnementale : pour 100 visites par mois, la page consomme 1,89 L d’eau et 126 gCO2e de GES.
Analyse cycle de vie
Ce site utilise des pratiques d'analyse du cycle de vie d'un site internet. Pour rappel, l'ensemble du cycle de vie détaillé peut être trouvé à ce lien : Cycle de vie d'un projet web - Agencewebdigitale.com.
De plus, une explication complète de l'Analyse cycle de vie peut être trouvée ici : Analyse du Cycle de Vie ACV - eco-conception.fr.
Diminuer l’impact
Sources :
- Evaluer l'empreinte environnemantale de votre site Internet - France Num
- Ecoindex
- Modélisation, simulation et optimisation pour l’éco-fabrication - Thèse de Hichem Hassine
Le site gouvernemental propose aussi des pistes pour améliorer son site et propose ainsi une brochure de conseils.
Le site EcoIndex donne quelques exemples concrets pour optimisez sa page web mais insiste principalement sur l’adoption d’une approche d’écoconception.
Si la page est lourde :
- Optimisez les images en choisissant le bon format et réduisant la taille
- Evitez les vidéos et fonds vidéos
- Compresser les fichiers
- Remplacez autant que possible les images d’interface par des styles CSS et des pictos
- Facilitez la mise en cache navigateur
Si la page est trop complexe :
- Limitez le contenu et les fonctionnalités à l’essentiel
- Optez pour l’approche « mobile first »
- Évitez les mécanismes comme le « scroll » infini et les carroussels
S’il y a trop de requêtes :
- Limitez l’utilisation de widgets et plugins
- Utilisez des polices standards plutôt que des polices custom
- Regroupez les images dans un sprite
- Regroupez certaines feuilles de styles (CSS) et bibliothèques Javascript (JS).
- Préférez les pages statiques
Outre ces petits conseils à garder en tête, plusieurs outils sont aussi mis à disposition pour suivre sa démarche d'écoconception :
- Plugin GreenIT Analysis
- Plugin Ecoindex
- Badge Ecoindex
- Ecoindex CLI
Eco-conception web
Sources :
- Check-list de bonnes pratiques - Collectif conception responsable de service numérique
- MON 3.2 de Louise Gacoin
- Ecoindex - Ecoconception
- Modélisation, simulation et optimisation pour l’éco-fabrication - Thèse de Hichem Hassine
L’écoconception est “une démarche préventive et innovante qui permet de réduire les impacts négatifs du produit, service ou bâtiment sur l’environnement sur l’ensemble de son cycle de vie (ACV), tout en conservant ses qualités d’usage”. - Définition de l'ADEME
L’écoconception d’un site web c’est “prendre en compte ses impacts environnementaux à chaque étape de son cycle de vie : des spécifications, à la conception fonctionnelle et graphique, jusqu’à l’utilisation finale, en passant par le développement et la maintenance.”. Définition de l'ADEME
Cette démarche pousse à créer des logiciels plus sobres, moins ‘gras’, centrés sur l’essentiel. Cela a des avantages supplémentaires, ils sont plus simples d’utilisation et utilisent moins de batteries. L’écoconception permet d’améliorer l’efficience d’un service numérique.
L’écoconception à 5 bases fondamentales :
- La définition de l’unité fonctionnelle du service : sa fonction principale pour l’utilisateur sous forme d’acte métier
- L’évaluation de l’impact environnemental de tous les équipements nécessaires à la mise en œuvre du service
- sur toutes les étapes de son cycle de vie
- selon plusieurs indicateurs environnementaux
- dans une démarche d’amélioration continue
Le collectif greenIT a établi une liste détailler de 115 bonnes pratiques d’écoconception des produits web sur l’ensemble de leurs cycles de vie, de la spécification au support / maintenance / fin de vie. Ces mesures peuvent aller de limiter les données collectées à combiner les fichiers CSS et Javascript.
Quelques pratiques simples à mettre en place sont la modification du code pour en réduire la consommation, privilégier des plugs ins qui appellent toutes les données en une fois et simplifier les designs.
Innovation frugale
Sources :
Dans la démarche de créer des modèles économiques plus durables et des meilleurs moyens de fabriquer et d’innover, l’innovation frugale a été inventée. C’est une démarche cherchant à répondre à un besoin simplement et efficacement avec un minimum de ressources. Elle est intéressante d’un point de vue environnementale car elle permet d’économiser sur les ressources mais aussi d’un point de vue économique, elle permet d’offrir des solutions moins chers pour les personnes à plus faible pouvoir d’achat.
Les solutions ont plusieurs caractéristiques, elles sont épurées au maximum, répondent précisément au besoin, ne possèdent pas d’ajouts superflus, leurs implémentations et moyens de réalisation sont allégés et efficaces.
Cette innovation a été résumée par Mokter Hassain en 4 caractéristiques :
→ Une gestion prudente, parcimonieuse des ressources naturelles
→ Un produit robuste, au prix abordable et à la performance minimale
→ Des attributs de soutenabilité
→ Un produit adaptable
Pour pouvoir mettre en place ce type d’innovation, cela nécessite d’avoir une connaissance des besoins réels des consommateurs. Ainsi il peut être intéressant de mettre en place des pratiques de design thinking et d’UX qui sont globalement déjà utilisées dans le monde de l’informatique et de les mettre aux service de la frugalité des applications, sites webs et logiciels pour les rendre le moins consommateur possible.
Dans le numérique, il existe quelques exemples de la mise en place de ce type d’innovation comme le téléphone portable développé par l’entreprise Emporia Telecom.
Economie circulaire et digital
Sources :
L’économie circulaire reste un pilier important des pratiques pour réduire notre impact environnementale. Pour comprendre plus en détails ce que c’est, je recommande de lire cet article : L'économie circulaire - Ecologie.gouv.fr
Cependant, l’économie circulaire est principalement pensée sur les flux physiques. Ces flux physiques sont important dans le monde du digital mais sont-ils les seuls ?
D’un point de vue matérielle, il est intéressant de considérer l’économie circulaire étant donné l’impact important de la fabrication des appareils électronique comparé à leurs utilisations. En effet, en France, c’est 76% des GES du numérique qui sont dus à la phase de fabrication. Ainsi, il est intéressant d’appliquer les principes de l’économie circulaire (Réemploi, recyclage et réutilisation) à nos appareils numériques au lieu de les jeter. Différents modèles existent sur comment apporter le plus de valeur pendant le cycle de vie d’un appareil.
Cependant le digital peut aussi devenir un outil très important pour l’économie circulaire. Cela passe notamment par le partage de données : garantir l’accès plus rapide et pour tous à des informations précises. Faciliter les échanges permet de gagner du temps mais aussi réduire la pollution causée par l’activité sur le web. Mais ce partage permet aussi de faciliter la mise en place des principes de l’économie circulaire pour des pratiques plus matérielles.
Il peut aussi être utilisé comme plateforme pour développer l’économie circulaire comme des place de marché digitale comme Organix.
Des technologies peuvent aussi être utilisée pour garantir l’utilisation complète de l’économie circulaire comme la blockchain qui garde une trace de toutes les transactions et est infalsifiable.